bien posée, elle se fait balader
Négligemment ou confortablement installée, elle se balade au gré d’une marche plutôt vive. Elle entend chaque pas qui est fait et elle est doucement ballotée, bien assise dans cette espèce de couffin personnalisé. Elle ne voit pas ce qui se passe autour d’elle, dehors, à l’extérieur, elle est un peu sauvage, elle est plutôt timide (non, intimidable, ce serait plus juste), Minouche. C’est une adorable petite chatte mais elle n’aime pas trop les autres. Ni les autres félins, ni les autres humains. Elle n’a qu’un Dieu, qu’un seul Maître. Elle ne connaît qu’un seul prince, le seul qui puisse partager certains charmes avec elle. Moi, je la connais mais je ne peux pas décider pour elle. Qui suis-je à ses yeux ? Je suis juste un porteur, un arrangeur, un toiletteur et un promeneur. Comme avec les chiens.
Là, elle est douillettement installée pendant que je marche et elle ne cherche même pas à regarder ce qui se passe dehors. Elle s’en fout. Purement et simplement. Elle est indifférente aux autres. Elle ne reconnaît que celui qu’elle s’est elle-même choisi et c’est le seul à qui elle accepte éventuellement d’obéir au doigt et à l’œil. Et pourtant (et pourtant, et pourtant…), elle n’a pas besoin qu’on lui donne des ordres, juste qu’on la sorte quand elle est sûr qu’elle ne se fera pas agresser (a-t-elle subi des maltraitances avant de rencontrer son nouveau maître ?) et alors, si c’est lui, elle se laisse approcher, elle se laisse observer, elle se laisse toucher voire caresser. Mais il faut prendre son temps, c’est toujours un peu la première fois, à chaque fois. Il faut savoir être patient, avec elle.
Là, je marche, nous sommes tous les deux et nous allons là où nous allons rejoindre son maître, je sais qu’elle sait où nous nous rendons, elle connaît le chemin et pourtant, elle est à l’abri, à l’abri des regards et à l’abri des autres. Je marche vite, je pense qu’elle subit les déhanchements de mes pas un peu rapides. Un peu comme une houle, celle qu’affronte un bateau peut-être déjà ivre. Minouche, quand elle est recluse, comme là, sans qu’on puisse la voir, dans ce panier pour la transporter, panier qui n’en est pas réellement un, elle a confiance. Elle sait que là, là où elle est cachée, rien ne peut lui arriver. Et au bout, au bout de ce tunnel, il y a des choses enfin agréables qui l’attendent. L’amour de son maître. Les retrouvailles avec son maître. Moi, je me suis contenté de la garder, d’en prendre soin.
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