le plus ravi de tous

Personnellement, avant cette invasion de réfugiés chez moi, tous ces santons et toutes ces décorations de Noël, je n’y connaissais pas grand-chose en personnages de la crèche hormis les incontournables que sont le père, la mère, le fils et le Saint-Esprit, ainsi soit-il (j’ai des restes, hein ?) auxquels il fallait ajouter l’âne, le bœuf, un ange ou deux, un berger (pensée pour Helmut) et quelques moutons, dans un premier temps, avant l’arrivée des rois mages, en provenance du Proche Orient (sans doute grâce à un couloir humanitaire, pour cette année) mais là, avant-hier, j’ai appris qu’il y en avait d’autres, des personnages, surtout en Provence et je remercie Jany de m’avoir parlé de son préféré, Le Ravi, celui qui est tellement content qu’il lève les bras au ciel en souriant avec un air des plus réjouis.

Effectivement, en y regardant de plus près, il est bien réfugié chez moi, lui aussi. Je ne l’avais pas spécialement remarqué car ils sont assez nombreux mais j’ai demandé à Helmut de me présenter certains autres de ses « collègues » : le vieux et la vieille. Il paraît que ces deux-là n’ont pas de prénom. L’ont-ils oublié ou ne l’ont-ils jamais su ? Si ça se trouve, Alzheimer, ça touche aussi les vieux santons. Il m’a parlé du pêcheur (celui qui va chercher des poissons pas celui qui commet des pêchés – véniels ou non) ; il m’a parlé du tambourineur, celui qui est finalement agaçant à toujours faire du bruit ; il m’a présenté le ramoneur et la lavandière en me précisant qu’il ne fallait pas les mélanger car ils n’étaient pas du tout compatibles ; et la poissonnière, le boulanger, le meunier (qui dort ?), le bûcheron, la fermière (et le cul de la fermière ?) et là, tout d’un coup, j’ai tout compris. Finalement, tout est mercantile.

Finalement, la crèche provençale, ce n’est ni plus ni moins qu’une espèce de petit centre commercial avec tous les corps de métier et ça corrobore bien ce que je pense : Noël n’est qu’une affaire de gros sous. Helmut m’a même dit qu’il ne fallait pas se leurrer mais à part deux ou trois, ils sont tous là pour faire du chiffre, les santons. Lui, Helmut (et c’est peut-être ce qui m’a plu chez lui), il garde les moutons et ça lui suffit. Il m’a quand même demandé de lui en dessiner un quand il a vu que je le considérais comme un petit prince mais moi, comme je lui ai dit, vraiment désolé, je ne sais pas dessiner. En tout cas, pas les moutons. Mais bon, notre relation est au-dessus de ça. Et quand je l’ai repris dans mes bras, Le Ravi a eu l’air heureux de nous voir, Helmut, le berger et moi. Il a levé les bras et a souri jusqu’à ses deux oreilles.