l’ascenseur social

Parfois, dans la vie, il ne faut pas être trop gourmand et il ne faut pas avoir des rêves plus grands que le ventre (je viens de l’inventer, celle-ci, n’allez pas croire que je me suis trompé !) ou alors, il faut faire les choses à l’instinct ou avoir le sens du risque. Je sais que je n’ai jamais été dans cette dernière catégorie, je n’ai rien d’un aventurier et le seul courage dont je peux faire preuve, c’est quand je l’écris, le mot. Sinon, je suis plutôt du genre couard, pleutre. Les deux me vont  bien. Bref, je ne me suis jamais donné les moyens de faire des choses un peu audacieuses, dans ma vie. J’ai toujours été un bon petit soldat mais je n’ai jamais osé essayer de transformer mes rêves en réalité. Et puis, je suis peut-être un peu fumiste, aussi, ça, je vous l’accorde. Mais malgré tout ça, j’espère être quelqu’un de bien.

Bien sûr, si je me pense sur mon passé, je peux avoir quelques regrets : j’aurais aimé savoir jouer du piano et comme j’aime écrire, j’aurais pu essayer de composer des chansons (je ne sais pas bien chanter, non plus et le pire, pour moi, c’est justement l’écriture de chansons, c’est très difficile, je n’y arrive pas)… J’aurais pu être un grand photographe ou un grand metteur en scène. Ou un des plus grands écrivains français et on serait venu visiter ma demeure et les gens auraient été émus de voir ma bibliothèque, mon lit, mon ordinateur et que sais-je encore. Non, j’ai été salarié et j’ai toujours fait des choses en parallèle sans chercher à persévérer. Pas grave. Et même pas mal. Juste un peu si j’y pense trop fort. Mais j’y pense et puis j’oublie. Comme une espèce de petit Alzheimer à la demande.

Et là, l’autre jour, quand j’ai entendu parler de cet escalier qui voulait changer de métier et qui a fait des pieds et des pieds pour faire autre chose de sa vie, j’ai été un peu admiratif. C’est vrai, ça, quand on naît escalier, en général, on le reste toute sa vie. Sauf si on a l’intelligence d’attraper l’ascenseur social quand celui-ci se présente. Et là, l’escalier a demandé une formation pour devenir escalator. Forcément, ça fait plus classe, quand on ne connaît pas tous les tenants et les aboutissants et l’herbe est toujours plus verte chez les autres. Alors, cet escalier est devenu escalator et même s’il n’a pas voulu le montrer, au début, il a vite été désenchanté : très rapidement, il n’a pas supporté la routine de la mécanique et il a fini par se suicider en se jetant d’un étage bien trop haut pour lui. J4ai de la peine pour lui.