le beurre sur la tartine
À la différence de Jean-Michel, moi, je ne mange pas des petits pains au lait de chez Lidl, le matin. Ni même aux autres moments de la journée. Parce que j’essaie de ne pas manger des viennoiseries industrielles ni même artisanales. Et parce que je me dis que tant qu’à faire, si je devais me lâcher, ce ne serait pas pour des petits pains au lait de chez Lidl. Et puis je n’ai pas à me justifier. C’est ainsi que soit-il. Amen. Non, moi, les jours fastes, mon grand plaisir, c’est de siroter mon café devant mon ordinateur, en écrivant ou en lisant et ensuite, si j’ai le temps de faire ça, je vais chercher mon pain chez l’excellent artisan boulanger du quartier et alors, je lui prends deux baguettes d’épeautre (je sais, normalement, ils étaient douze mais on n’est pas là pour faire du catéchisme) un peu après 8 heures.
Et là, comme le pain est chaud, bien chaud, mon grand plaisir, c’est de me faire deux tartines avec la moitié d’une des deux baguettes et d’étaler du beurre dessus et de les déguster : le bonheur du beurre fondant légèrement sur de la mie chaude. Celui qui n’a jamais goûté à ça ne sait pas ce qu’il perd. Mais j’ai remarqué que le beurre ne savait pas bien se tenir, sur du pain chaud. Il a tendance à se liquéfier. Au début, j’ai cru que c’était par pur plaisir masochiste mais non, je crois qu’il ne supporte pas la canicule, le beurre donc, tout comme moi, il ne doit pas aimer ça et depuis quelques jours, j’ai donc arrêté de me faire mes deux tartines le matin car comme je ne suis pas un mauvais bougre et que j’ai quand même un peu envie de respecter l’esprit de Noël, vous savez, le tout amour…
Sauf que dès le mois de janvier, dès lundi prochain, je pense que je vais recommencer à me payer mon plaisir solitaire comme avant. Je vais me beurrer les tartines. Mes tartines vont se beurrer la gueule. Et elles n’auront pas leur mot à dire. Quand je les achète, mes baguettes, je considère qu’elles m’appartiennent et qu’elles n’ont plus qu’à m’obéir, à me satisfaire et à me combler. Alors que les futures se le tiennent pour dit, dès la semaine prochaine, ce sera beurre fondant pour chacune d’entre elles. Et je ne tolèrerai aucune rébellion, c’est une de mes résolutions pour cette année qui va commencer. Aucune contestation. Aucune révolte. Mais en parallèle, je jure de ne jamais dépasser la demi-baguette beurrée aux alentours de 8h30. Je me sens mieux maintenant que c’est dit.