Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
C'est écrit
10 décembre 2021

Gabriel, un ange ?

J’ai pris l’habitude de ne pas faire l’intégralité de mes trajets en tram quand j’ai besoin d’en prendre un. Je m’arrête toujours deux, trois ou quatre stations avant celle de ma destination « finale » pour faire le reste à pied. Même s’il pleut. Ce qui peut arriver, de temps en temps, quand on est au mois de décembre. Surtout si celui-ci suit celui de novembre. Et donc, loin de me forcer, je marche. Ça ne me fait pas de mal. Mais c’est souvent surtout le matin, plus rarement le midi, quand je vais rentrer pour déjeuner. Parce que je me sens nettement plus pressé. Parce que j’ai faim. Parce que c’est comme quand on a terminé son travail, on a hâte de rentrer chez soi. Oui, parce que finalement, le matin, moi, quand je vais chez le patron, c’est comme si j’allais bosser même si ce n’est pas tout à fait ça.

Et donc, il y a quelques jours de cela, alors qu’il avait plu toute la matinée, au moment de partir de chez le patron, un grand soleil surprenant m’a fait décider de marcher jusqu’à la place des Quinconces pour attraper un tram. Et me voilà en train de traverser le centre-ville et en arrivant sur la place Saint-Projet, de loin, j’aperçois un mec que je connais, sans masque, en train de manger un sandwich ou quelque chose comme ça. Et je vais vers lui. Il m’a vu et s’est légèrement interloqué car, je le connais un peu, même si je ne l’avais pas vu depuis longtemps, ce n’est pas quelqu’un qu’on aborde facilement. Il est autiste et s’il a fait beaucoup de progrès pour communiquer avec les autres, avec lui, ce n’est jamais gagné. Il a été mon voisin (chez ses parents) pendant des années. Et là, c’était lui.

Comme je portais mon masque, il ne m’a pas remis tout de suite. Je l’ai soulevé et là, son visage s’est éclairé. Je lui ai demandé comment il allait et il m’a répondu bien et vous et le président ? Il va bien. Et là, il s’est arrêté, il a suspendu ses gestes et ses paroles et m’a regardé profondément. « Attendez, vous êtes bien né en 1959 ? » Il a réfléchi quelques quatre ou cinq secondes et m’a dit : « Vous êtes bien né un vendredi. » Ce qui est vrai. Il me l’avait déjà dit, un jour où il était venu chez nous, à notre ancienne adresse, il m’avait demandé ma date de naissance et avait tout calculé presque instantanément. « Et le président aussi, il est né un vendredi ! » Mais quelle mémoire et quel cerveau incroyables ! Je lui ai fait un grand sourire sous mon masque et nous nous sommes checkés. C’est Gabriel.  

Publicité
Publicité
Commentaires
C'est écrit
Publicité
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 199 017
Archives
C'est écrit
Publicité