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17 mai 2021

bon anniversaire, papa

Waouh, 88 ans, on peut dire que c’est un âge qui marque. C’est drôle parce que je n’aurais jamais imaginé que mon père puisse connaître un tel nombre double : deux infinis redressés. Ce n’est plus tout à fait ton cas, tu es loin d’être droit comme la justice ni raide comme un piquet, j’en veux pour preuve ce que tu es devenu en l’espace de quelques mois, depuis le début de cette année. Non, tu as même sacrément tendance à pencher sérieusement sur un côté. Ça me fait vraiment bizarre de te voir être devenu vieux en plus d’être devenu quelqu’un parfois un peu étranger, depuis que tu ne parles plus normalement et depuis que tu as commencé de t’enfermer dans ton monde, un endroit dans lequel personne d’autre que toi n’est autorisé à pénétrer. On reste toujours un peu à la porte.

En tout cas, aujourd’hui, tu as 88 ans et tout à l’heure, nous allons venir manger le dessert avec toi, on nous en a donné la permission. On a prévu un de tes gâteaux préférés : le Paris Brest mais on n’aura pas le droit d’y mettre une bougie, je pense et encore moins d’arroser ça avec des bulles de champagne. Il nous restera celles de l’eau pétillante, parfaitement autorisée. De toute façon, peu importe le flacon, pourvu qu’on ait un peu l’ivresse de partager ce moment avec toi. Cette communion que nous allons essayer de vivre au mieux, toi et nous. Toi et moi. Parce que tu sais, ou tu ne le sais pas, mais c’est toujours compliqué quand je viens te voir. Et là, c’est un peu particulier, venir te dire « bon anniversaire, papa ! » alors que je ne sais même pas si tu seras réceptif, hein…

Je n’ai pas beaucoup de souvenirs de tes anniversaires de quand tu étais mon papa et que j’étais un enfant. Pas non plus de quand tu es devenu mon père et que je me suis transformé en adolescent. Et encore moins quand je suis parti vivre ma vie d’adulte (ah bon, je suis devenu un adulte ?) mais je sais une chose, chaque année, chaque 17 mai, je t’appelais, je t’ai appelé et je t’ai dit « bon anniversaire, papa » et toi, presque systématiquement, tu me répondais « ah merci, je te passe ta mère ! » Je me souviens de tes 60 ans, de tes 70 ans et de tes 80 ans mais cette fois, cette année, ça va forcément et vraiment être un peu, très différent : c’est ton premier anniversaire ailleurs que chez toi. Le premier anniversaire du reste de ta nouvelle vie. Et ça, ça, tu sais, il va bien falloir que je m’y fasse.

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